Joseph Kamal n’aurait jamais imaginé un seul instant se retrouver en prison. Un braquage qui tourne mal – il en suffit d’un – et toute sa vie bascule, perdant en même temps son frère et sa liberté. Plongé dans l’enfer du milieu carcéral, un environnement sans pitié et d’une violence inouïe, le jeune homme courbe l’échine, encaisse les coups et se forge une vraie carapace. Les années seront longues, il le sait.
« Au bout d’un temps infini, le greffier dit que c’est bon, tout est en règle, que la fouille est terminée. Il ôte ses gants et les jette avec répugnance dans une corbeille. Je peux enfin cacher ma nudité. Mais je ne rhabille plus le même homme qu’une heure auparavant. » (p.18)
Pourtant une explosion nucléaire inexplicable survient, comme une providence : il s’échappe et trouve refuge dans la zone interdite. Si cet épisode permet à Joseph de retrouver sa liberté, il va devoir apprendre à se débrouiller seul dans le causse, à survivre. Persuadé que l’enfer c’est les autres, Joseph choisit de faire l’expérience de l’extrême solitude sans se rendre compte qu’il va falloir vivre avec ce manque de présence humaine. Le temps s’étire, les saisons défilent, certaines plus difficiles que d’autres.
« Ils sont tous des rescapés de quelque chose, ils sont devenus les sentinelles vers autre chose. Ensemble ils essaient de recommencer une autre histoire. » (p.159)
Un roman dans la veine du « nature writing », sombre et lumineux, cru et poétique, où est jouée une nouvelle version du Robinson Crusoé de Daniel Defoe, une version plus actuelle, miroir de notre société. L’écriture de Sophie Divry est à couper le souffle et arrive à nous cueillir. Une belle ode à la puissance créatrice de la nature qui peu à peu reprend ses droits, et remet l’homme à sa juste place dans la complexité du vivant.
- Trois fois la fin du monde, Sophie Divry, Éditions Noir sur Blanc, 16.00€
C’est une très bonne idée de mettre en valeur « 3 fois la fin du Monde » …